La maison des Turner de A. Flournoy
Cela fait plus de cinquante ans que la famille Turner habite Yarrow Street, rue paisible d'un quartier pauvre de Detroit. La maison a vu la naissance des treize enfants et d'une foule de petits-enfants, mais aussi la déchéance de la ville et la mort du père.
Quand Viola, la matriarche, tombe malade, les enfants Turner reviennent pour décider du sort de la maison qui n'a désormais plus aucune valeur, la crise des subprimes étant passée par là.
Garder la maison pour ne pas oublier le passé ou la vendre et aller de l'avant ? Face à ce choix, tous les Turner, de Cha-Cha, le grand frère et désormais chef de famille, à Lelah, la petite dernière, se réunissent. Et s'il fallait chercher dans les secrets et la mythologie familiale pour trouver la clef de l'avenir des Turner et de leur maison ?
Ca peut pas toujours être les autres qui ont tort. Chacun son tour.
La plume d'Angela Flournoy est plutôt fluide. Des flash-backs des années 1945-1950 permettent de découvrir la rencontre et les premières années de couple des parents Turner tandis que plusieurs points de vue des enfants se succèdent au fil des pages et nous racontent le moment présent (2008 en l'occurence).
L'arbre généalogique en début d'ouvrage peut en démotiver certains avant même d'avoir commencer la lecture ! Avec treize enfants Turner puis une vingtaine de petits enfants, il semble impossible de retenir tous les noms. D'ailleurs, le choix de l'auteure est de se concentrer sur trois des enfants : Charles l'aîné, Leah la cadette et Troy, l'avant-dernier. Si cela facilite grandement la compréhension de l'histoire, je trouve tout de même dommage d'évincer complètement le reste de la fratrie car ils n'ont qu'un très petit rôle en fin de roman sans réellement avoir été présenté au lecteur...
Cette grande histoire est cependant très intéressante car elle est posée sur un fond sociologique typique des romans américains : racisme, précarité, addictions, tout est comme un lecteur lambda peut l'imaginer. Et de nombreux thèmes sont abordés comme l'addiction au jeu mais l'auteure développe également beaucoup l'aspect familial de l'histoire avec la pression que peut ressentir l'aîné ou les petites jalousies et préférences inévitables dans une famille nombreuse.
Un fil rouge frôlant souvent le fantastique est également présent et apporte un suspense qui contrebalance bien une certaine lenteur dans le récit. Cette histoire d'enfance, que l'on se raconte à tous les dîners de famille et qui fait encore sourire plusieurs décennies après, s'avère finalement beaucoup plus sérieuse que la plupart des Turner le laisse penser. Malheureusement, cela n'a pas suffi à combler mon envie de secret de famille...
Le dénouement est intéressant car tout le monde est enfin réuni et on découvre certaines personnalités mais il m'a paru inabouti car j'ai eu l'impression que le résumé nous vendait un mystère beaucoup plus important et surtout beaucoup plus tangible sur la maison des Turner.
En bref, une fresque familiale intéressante. Je regrette simplement le choix de l'auteure de se focaliser sur trois membres de la fratrie en évinçant quasiment les dix autres... Cependant, le fond m'a beaucoup plu et m'a permis de découvrir la ville de Detroit, ses quartiers précaires, son racisme ambiant même si je m'attendais à un secret de famille beaucoup plus percutant.
Pour aller plus loin : La bibliographie de l'auteure
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